Je lance une nouvelle activité : comment choisir et protéger ma marque ?
Introduction
Se lancer dans une nouvelle activité – ouvrir un commerce, créer une société, développer un produit artisanal – pose très vite la question du nom. Comment se distinguer de la concurrence ? Comment inspirer confiance aux clients ? Comment éviter qu’un concurrent ne s’approprie son identité ?
La réponse passe par la marque. Celle-ci n’est pas seulement un logo ou un nom : c’est un droit exclusif, reconnu par la loi, qui permet de protéger et de valoriser une activité.
Cet article propose un guide pratique pour comprendre la marque, ses conditions de validité, la procédure de dépôt, ses avantages et les erreurs à éviter.
I. Qu’est-ce qu’une marque ?
La marque est : « tout signe susceptible de représentation, qui permet de distinguer les produits ou services d’une entreprise de ceux d’autres entreprises ».
Une marque peut prendre de nombreuses formes :
un mot (Nike, Delhaize),
un logo (la pomme d’Apple),
un slogan (Just do it),
un son (le jingle de McDonald’s),
une couleur (le mauve de Milka),
voire la forme d’un produit (la bouteille de Coca-Cola).
La fonction de la marque est double : identifier l’origine d’un produit/service et créer un lien de confiance avec le consommateur.
II. Les conditions de validité d’une marque
Avant de déposer une marque, il faut vérifier qu’elle respecte les conditions légales.
1. Caractère distinctif
La marque doit se distinguer des produits ou services qu’elle désigne.
Exemple refusé : « Pain frais » pour une boulangerie.
Exemple accepté : « Tesla » pour des voitures.
Une marque originale sera plus forte juridiquement et plus mémorable.
Cela implique d’avoir un raisonnement tout à fait différent de celui qu’aurait un marketer qui vous conseillera souvent de trouver un nom en lien avec votre activité ; en droit, plus un signe est éloigné du produit ou du service qu’il désigné, plus il est fort.
2. Absence de caractère trompeur
Elle ne peut pas induire le consommateur en erreur.
« Champagne belge » pour un vin pétillant fabriqué à Namur = interdit.
3. Respect de l’ordre public et des bonnes mœurs
Les marques contraires à la morale ou aux symboles protégés sont rejetées (par ex. utilisation abusive de drapeaux nationaux).
4. Disponibilité
La marque doit être libre : elle ne peut pas entrer en conflit avec une marque ou un signe antérieur.
III. La recherche d’antériorités : une étape cruciale
Beaucoup d’entrepreneurs négligent cette étape, pensant que le dépôt suffira. En réalité, ni le BOIP(pour le Benelux) ni l’EUIPO (pour l’Europe) ne vérifient automatiquement l’existence de marques similaires.
Une recherche préalable évite :
les oppositions au dépôt,
les actions en nullité,
les procès en contrefaçon.
Où chercher ?
Bases officielles : BOIP, EUIPO, WIPO.
Internet, réseaux sociaux, registres des entreprises, noms de domaine.
En interrogeant un bureau spécialisé en dépôt de marques qui dispose des outils nécessaires pour procéder à une recherche approfondie.
Exemple : un créateur dépose « Abercrumpy » pour des vêtements. Il sera immédiatement attaqué par « Abercrombie & Fitch » et perdra tout son investissement.
IV. La procédure d’enregistrement
1. Au Benelux (BOIP)
Dépôt en ligne.
Coût : environ 244 € pour une classe.
Durée : 10 ans, renouvelable.
2. À l’Union européenne (EUIPO)
Un dépôt unique pour 27 pays.
Coût : 850 € pour une classe.
Attention : si la marque est refusée dans un État, elle l’est pour toute l’UE.
3. Le choix des classes
La marque est protégée uniquement pour les produits/services indiqués. La classification de Nice comporte 45 classes (ex. classe 25 = vêtements ; classe 43 = restauration).
Erreur fréquente à éviter : un coiffeur dépose sa marque uniquement pour des cosmétiques (classe 3) et oublie les services de coiffure (classe 44). Sa protection est incomplète.
4. L’opposition
Après publication, les titulaires de marques antérieures disposent de 2 mois (BOIP) ou 3 mois (EUIPO) pour former opposition.
V. Les avantages d’une marque enregistrée
1. Un droit exclusif
Vous avez le monopole d’usage pour vos produits/services. Personne ne peut utiliser un signe identique ou similaire entraînant une confusion.
2. Une arme contre la contrefaçon
Vous pouvez agir en justice, obtenir une interdiction et dommages-intérêts.
3. Un actif valorisable
La marque est cessible, licenciable et apportable en société. Elle devient un élément de valeur pour l’entreprise.
4. Un facteur de différenciation
Elle crée de la confiance, attire les clients et fidélise.
VI. Les erreurs fréquentes à éviter
Croire qu’un nom de domaine ou une inscription BCE suffisent : ces démarches n’accordent pas de droit de marque.
Choisir un signe trop descriptif : juridiquement faible.
Négliger la recherche d’antériorités : source de litiges coûteux.
Oublier l’international : penser uniquement au Benelux peut limiter le développement futur. Or, une marque n’est protégée que pour le territoire sur lequel elle est déposée
VII. Après l’enregistrement : protéger et valoriser sa marque
1. Surveiller
Le titulaire doit contrôler l’usage de sa marque. Il existe des services de veille.
2. Défendre
En cas de dépôt similaire : opposition. En cas d’usage effectif : action en contrefaçon.
3. Renouveler
Tous les 10 ans, moyennant paiement d’une taxe.
4. Exploiter
Licence, franchise, cession : autant de moyens de valoriser sa marque.
Exemple : un artisan wallon qui développe « Biscuit de Grand-Mère » peut un jour céder sa marque à une grande enseigne et réaliser une plus-value importante.
Attention, si vous n’exploitez pas votre marque pendant une durée de 5, la déchéance de celle-ci peut être demandé par toute personne intétessée.
CONCLUSION
La marque est bien plus qu’un simple nom : c’est une protection juridique et un levier économique.
Pour réussir son projet :
Choisir un signe distinctif.
Vérifier la disponibilité.
Déposer au BOIP ou à l’EUIPO, avec les classes adéquates.
Surveiller et défendre sa marque.
Valoriser cet actif au fil du temps.
Un dépôt bien réfléchi sécurise l’avenir d’une activité. Mieux vaut investir au départ que de devoir changer de nom sous la pression d’un concurrent.